mardi 15 février 2011

Discours du Père Théodore à l'occasion de l'ordre national du mérite

Monsieur Le Maire et 1er Vice Président de la Communauté Urbaine de Bordeaux,
Monsieur Le Consul de Grèce à Bordeaux,
Mesdames Les Présidentes des Associations Cultuelle et Culturelle grecques de Bordeaux,
Mes Chers frères, compatriotes et philhellènes,


Je ne peux débuter ce discours sans en passer au préalable par les remerciements. En premier lieu, à vous, Monsieur le Maire, je tiens à exprimer ma très sincère et profonde gratitude pour votre participation à cette distinction qui m’est attribuée aujourd’hui et d’avoir accepté d’être mon parrain. Etre décoré par vous relève plus que d’un grand honneur, et je tiens pour cela à vous remercier de tout cœur.  
 Sans pouvoir les citer tous, je dois remercier bien évidemment tous mes collaborateurs, mes compatriotes, mes amis philhellènes qui m’ont fait confiance, épaulé et ont été un soutien depuis maintenant presque quatre décennies. Les résultats sont ici aujourd’hui qui parlent et qui témoignent d’un travail fructueux. Nous avons pu réaliser ensemble, certes avec quelques sacrifices, un véritable projet commun dont nous pouvons être fiers.
Je remercie surtout ma famille. De par mes activités diverses je n’ai pas vu grandir mes enfants et mes petits-enfants. Sans l’aide et le soutien de mon épouse, je n’aurais jamais pu accomplir seul ce que j’ai réalisé aujourd’hui. Je partage avec elle cette haute distinction et je suis reconnaissant de sa grande patience à l’égard des nombreuses réunions, conférences et soirées grecques auxquelles mes responsabilités de prêtre et de professeur me tenaient d’assister, et où j’ai dû la laisser seule avec mes enfants.
Mes remerciements vont également au groupe de paroissiens qui, sous le couvert de l’anonymat, a milité secrètement pour que j’obtienne cet honneur ô combien inattendu pour moi. 
Enfin, merci à toutes et à tous qui êtes venus si nombreux pour participer et partager ce bonheur. Que le Seigneur, notre Dieu, vous garde et vous guide dans chaque pas de votre vie.
Χίλια μύρια, εγκάρδια ευχαριστήρια πατρικά   

C’est avec une émotion profonde que je me tiens, aujourd’hui, parmi vous, dans ces magnifiques locaux de la mairie, qui signifie pour moi l’aboutissement et la consécration d’un long travail multiple, varié, et combien compliqué à l’intérieur comme à l’extérieur de la communauté hellénique de Bordeaux ; un travail mené avec altruisme et qui n’a eu d’autre but que d’apporter un témoignage spirituel et culturel, ainsi qu’un partage de sentiments fraternels qui touchent le cœur de l’homme. Mon souhait fut, dès l’origine, d’enrichir mes concitoyens et de m’enrichir à travers eux, toujours dans un respect mutuel, celui de mon pays d’accueil, de sa philosophie, de son histoire, de ses coutumes et de sa politique démocratique.
J’ai essayé modestement, dans notre microcosme, de rapprocher mes deux pays, la France et la Grèce, en mariant leurs villes, leurs universités, leurs écoles, leurs associations. En effet, la Gironde est le département en France qui compte actuellement le plus grand nombre de jumelages avec les villes de Grèce. Ces échanges franco-helléniques ont permis de faire connaître et de vivre à une autre échelle la culture des deux pays, l’une complétant l’autre.
Monsieur Le Maire, l’Europe ne peut se réaliser que dans les papiers. Nous devons nous efforcer de vivre dans la proximité, les uns à côté des autres, par le biais du mélange des cultures, de manière à créer des liens fraternels indéfectibles entre les nations. En somme, un vrai œcuménisme dans la pratique et non seulement dans la théorie.
Cela passe notamment par le grec moderne que j’enseignais – et que je continue d’enseigner – dans tous les milieux ; une langue diachronique qui a nourri les langues occidentales d’un vocabulaire considérable.
Certes, il est vrai que la Grèce traverse actuellement une crise économique  sans précédent. Mais ce pays d’une histoire et d’une civilisation coryphées de toutes les autres, pays que vous, Monsieur le Maire, aimez tant et qui reste ancré dans votre cœur, n’en est pas à son premier combat. Et je persiste à croire que la Grèce sortira vainqueur et a encore beaucoup à offrir à l’Europe, ainsi qu’à toute l’humanité.
Je tiens à partager cette distinction avec ma Communauté, car c’est un honneur collégial. A mon arrivée à Bordeaux, en 1972, j’ai trouvé une paroisse dispersée et divisée que j’ai réussi à ressouder et à faire prospérer avec toute mon affection paternelle. Il n’y avait alors que quarante-huit familles grecques. Actuellement elles sont recensées au nombre de trois cent quatre-vingt. Je n’oublie pas ceux qui m’ont aidé et donné leur contribution à la communauté grecque et qui nous ont malheureusement quitté.
 Je n’ai à aucun moment regretté ce que j’ai pu accomplir depuis mes premiers pas en France. Je suis fier et rempli de bonheur. Je pourrais probablement en faire davantage et mieux encore, mais mes forces et mes possibilités arrivent bientôt à terme. Il a fallu me battre et faire face aux ingratitudes, mais la vie pastorale est ainsi : on ne peut parvenir à la résurrection sans passer par la crucifixion et la souffrance qui l’accompagne.
La France, ce pays que j’aime, m’a accueilli, m’a protégé, m’a nourri d’une culture si philosophique, si humaine. Je la remercie et suis très reconnaissant pour tout le bien qu’elle m’a apporté à moi ainsi qu’à ma précieuse famille. De ce fait, je vous assure, Monsieur le Maire, de mon dévouement et de mon service absolu auprès de la ville de Bordeaux. Vive la France et vive la Grèce!

Père Théodore