samedi 24 décembre 2016

Message de Noël du Patriarche oecuménique Bartholomée Ier

† Bartholomée par la grâce de dieu archevêque de constantinople, Nouvelle Rome, et patriarche œcuménique,
tout le plérôme de l’Église grâce, miséricorde et paix du christ sauveur né à Bethléem
* * *
« L’incarnation du Christ m’est une nouvelle création ».
Frères et Enfants bien-aimés dans le Seigneur,
Nous louons et glorifions Dieu dans la Trinité qui, cette année encore, nous a permis d’arriver à la solennité de la Naissance selon la chair du Fils et Verbe de Dieu le Père « dans l’obscurité de Bethléem ».
La sainte Église, celle dont le Christ incarné « a pris la chair », la rendant « parure du monde », fête remplie de joie. Elle tressaillit pour les bénédictions divines dont le genre humain, mais aussi « la création » furent gratifiés. « L’univers en ce jour d’allégresse est comblé, car le Christ est né de la Vierge ».
Contrairement au « premier moteur immobile » des Anciens, notre Dieu est en soi communion d’amour, évoluant dans le temps dans un élan d’amour pour l’homme et le monde. « Voici ce qu’est l’amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, c’est lui qui nous aimés ».
Le Verbe éternel du Père qui a donné à l’homme l’ « être », par Son Incarnation lui fait don du « bien-être ». « Telle est pour nous la solennité, telle est la fête que nous célébrons aujourd’hui : c’est la venue de Dieu chez les hommes, afin que nous partions pour nous rendre chez Dieu, ou que nous y revenions (…) afin que nous déposions le vieil homme et revêtions le nouveau, et, de même que nous sommes morts en Adam, que nous vivions de même dans le Christ, naissant nous aussi avec le Christ, étant crucifiés avec lui, étant ensevelis avec lui, et ressuscitant avec lui ». Le chemin de déification par grâce est désormais ouvert à tout être humain venant au monde. Nous sommes tous « contenus en Dieu ». « Il n’y a plus ni Juif, ni Grec ; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre ; il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ ».
Malheureusement, l’Évangile de Noël est de nouveau prêché dans un monde où retentit le bruit des armes, où dominent l’inégalité et l’injustice sociale. La situation est intolérable pour les innombrables enfants victimes de conflits armés, d’états de désordre, d’exploitations de toute sorte, de persécutions et de discriminations, de famine, d’indigence et de privations douloureuses.
En avril dernier, nous avons eu l’occasion, avec Sa Sainteté le pape François et Sa Béatitude l’archevêque Jérôme d’Athènes et de toute la Grèce, de constater de visu à Lesbos les tribulations des réfugiés et des migrants, surtout les problèmes aigus des enfants éprouvés, les victimes innocentes et sans défense de la violence guerrière, des discriminations raciales et religieuses, et de l’injustice, dont le nombre ne cesse de croître.
La solennité du Verbe de Dieu incarné pour nous, Christ enfant que le pouvoir séculier cherche à « faire périr » selon l’évangéliste Matthieu, nous interpelle ; elle nous appelle à veiller sur les enfants, à défendre ces victimes vulnérables et à respecter le caractère sacré de l’enfance.
Certes, dans les pays du monde économiquement développé et politiquement plus stable, les enfants et leurs âmes sensibles sont aussi menacés par la grande crise du mariage et de la famille, par des interventions variées, ainsi que par l’exercice de violence physique et psychique. L’âme enfantine est altérée par le rôle catalyseur que jouent dans leur vie les médias électroniques, surtout la télévision et l’internet, et par le changement radical de l’environnement communicationnel. L’économisme effréné les transforme très tôt en consommateurs et l’eudémonisme fait très rapidement disparaître l’innocence enfantine.
En vue de ces dangers, le saint et grand Concile de l’Église orthodoxe, s’adressant « avec amour et tendresse » aux enfants et aux jeunes, dit dans son Encyclique : « Parmi les multiples définitions contradictoires à propos de l’enfance, notre très-sainte Église souligne les paroles de notre Seigneur si vous ne vous convertissez et si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux et qui n’accueille pas le Royaume de Dieu comme un enfant n’y entrera point[, de même que notre Sauveur le dit à propos de ceux qui empêchent les enfants de venir à Sa suite et de ceux qui les scandalisent».
Le mystère de Noël est condensé dans les paroles du Kontakion de la fête : « Car en ce monde vient pour nous un enfant nouveau-né, le Dieu d’avant les siècles ». Le Dieu Verbe, en tant qu’enfant et l’enfant en tant que Dieu est révélé aux humains au « cœur pur » et ayant la simplicité de l’enfance. Les enfants comprennent des vérités qu’il est impossible aux « sages et intelligents » d’aborder. Comme Elytis le note : « Ce n’est que par des enfants que tu construis Sion».
Frères et enfants bien-aimés dans le Seigneur,
Nous lançons un appel à tous de respecter l’identité et la sacralité de l’enfance. Face à la crise mondiale des réfugiés, qui viole surtout les droits des enfants, face au fléau de la mortalité infantile, à la famine, au travail des enfants, aux blessures corporelles et à la violence psychologique, mais aussi face aux risques d’altération de l’âme enfantine en raison de leur exposition incontrôlée à l’influence des médias électroniques de communication et de leur assujettissement au consumérisme, nous proclamons 2017, Année de protection du caractère sacré de l’enfance, appelant tout le monde à reconnaître et à respecter les droits et l’intégrité des enfants.
Comme un autre document important du saint et grand Concile le souligne, la parole de l’Église du Christ « envers le monde n’a pas comme but principal de dénoncer, de juger ou de condamner le monde, mais de lui procurer comme guide l’Évangile du Royaume de Dieu, l’espoir et la certitude que le mal, sous n’importe quelle forme, n’a pas le dernier mot dans l’histoire et qu’il ne faut pas lui laisser diriger son parcours ».
Dans l’humilité et la componction, nous prosternant devant notre Sauveur qui « nous a visités venu d’en haut », entonnant par des chants divinement inspirés la grandeur de l’économie divine à notre faveur, fléchissant le genou devant la toute-sainte Mère de Dieu portant l’Enfant, depuis le Phanar à la lumière inextinguible, nous adressons le salut festif « le Christ vient au monde, glorifiez-le, le Christ descend des cieux, allez à sa rencontre » aux fidèles proches et lointains de l’Église de Constantinople et leur envoyons nos vœux paternels et notre bénédiction patriarcale.
« Nous fortifiant dans la grâce qui est dans le Christ Jésus », dans la concorde, la foi et l’amour sincère, engageons tous le bon combat de la nouvelle vie dans l’Église, obéissant aux commandements du Seigneur, Lui qui sera avec nous « tous les jours jusqu’à la fin des temps ».
Noël 2016
† Bartholomée de Constantinople
fervent intercesseur de vous tous en Dieu”

jeudi 1 décembre 2016

Bartholomée, patriarche œcuménique, apôtre et visionnaire (RCF - "Le Billet")


C’est le titre du livre, traduit de l’anglais, qui vient de sortir à l’occasion du 25ème anniversaire de l’accession de Sa Sainteté au Trône de la Grande Eglise, celle qui tire sa filiation de l’apôtre André, premier des appelés. C’est en 1991 que Bartholomée devint patriarche œcuménique de Constantinople, une époque marquée par le séisme politique de la chute du Mur de Berlin un an auparavant.

Ce livre a été écrit par John Chryssavgis, un proche conseillé de Bartholomée, docteur en patrologie d’Oxford, et sa préface par le pape François, qui emprunte les mots de l’apôtre Paul pour dire à son homologue qu’il est un homme qui « chemine par la foi » (2 Cor. 5:7).

Le patriarche œcuménique impose le respect et l’admiration. A l’image du vrai « épiscope », il est à la fois digne et populaire. C’est aussi un polyglotte, qui parle, outre le grec, le français, l’anglais, l’italien, l’allemand et le turc. En bon pasteur, à l’image de celui qu’il sert, le Christ, il a une parole adaptée pour chaque situation et pour chaque public qu’il reçoit. Il est infatigable. Avec simplicité et agilité, il agit et réagit, instruit et apaise, dirige et accueille les fidèles et officiels, moines et ecclésiastiques, politiques, écrivains ou journalistes venant du monde entier.

Conscient des difficultés de son patriarcat dans ce cadre turc, il ne les occulte pas pour autant. Chef d’une petite communauté réduite à une poignée de milliers de fidèles orthodoxes vivant principalement à Constantinople, il est en même temps le patriarche œcuménique, celui qui dans la conscience de l’Eglise orthodoxe universelle est le « Primus inter pares ».

Il a la charge la plus difficile d’être, au sens le plus ontologique du terme, le « diacre » de l’unité panorthodoxe. Nous lui souhaitons une longue vie ! Is polla eti Despota !


Père Théodore